Quand on évoque la question du stress, c’est LE conseil qui arrive en première ligne sur les posts Instagram comme sur les articles spécialisés dans le bien-être mental : il faut lâcher prise. Lâcher prise, deux mots, une tournure répétée comme une évidence. Seulement voilà, lâcher prise est bien plus compliqué qu’il y paraît, et les propositions alléchantes type « Exercices faciles pour lâcher prise », « Comment lâcher prise rapidement », « Lâcher prise : comment réussir ? » n’y changeront rien. Pour parvenir à lâcher prise, il faut déjà comprendre de quoi il s’agit vraiment et ensuite s’adapter. Or tout cela demande de la pratique. Explications.

Quand on lâche prise, on lâche quoi ?

Lâcher prise, mais encore ? Que désigne cette expression ? Concrètement, il s’agit de lâcher la prise qu’on a sur quelque chose, par exemple un chien qui lâche le jouet qu’il rongeait, un voleur qui lâche le sac qu’il voulait dérober, un enfant qui lâche le bord de la piscine qu’il cramponnait. Dans ces trois exemples, on sent la pression exercée par le sujet, chien, voleur, enfant. En face du sujet, un objet du désir, une résistance, une peur. Quelque chose qu’on veut s’approprier ou dont on veut se protéger. Quelque chose ou quelqu’un qui résiste.  

Psychologiquement, le lâcher prise désigne, selon le Larousse un « moyen de libération psychologique consistant à se détacher du désir de maîtrise ». Il s’agit d’abandonner le contrôle que l’on a d’une situation… quitte à se mettre en péril ? Un jouet qu’on sert pour qu’on ne le dérobe pas, un sac qu’on vole parce qu’on manque d’argent et qu’on doit survivre, le rebord d’une piscine qu’on agrippe frénétiquement par peur de se noyer. Et là, une première réflexion : quand on lâche prise, on lâche quoi ? Et pourquoi avait-on décidé de saisir cela, de s’y attacher, de s’y agripper ? 

Comprendre le processus de prise

Avant tout lâcher prise, il y a prise. En prendre conscience est déjà un énorme pas en avant. Comprendre ce qui déclenche ce processus, dans quelles circonstances il a lieu, pourquoi et dans quel but on s’est ainsi accroché est aussi essentiel. Les exemples ne manquent guère : la personne qu’on vient de rencontrer, qui nous plaît beaucoup… mais qui ne rappelle pas ; pourquoi sommes-nous obsédés par l’attente de cet appel ? 

Qu’est-ce que cela suscite en nous ? Quel souvenir ? Quelle angoisse ? Pourquoi n’arrivons-nous pas à lâcher prise, pourquoi cette pensée mouline-t-elle dans notre cerveau ? Cela vaut également pour le coup de fil qui confirmera si on est engagé ou pas, mais aussi quand on apprend une mauvaise nouvelle, par exemple qu’on doit quitter l’appartement dans lequel on vit en location, car il va être vendu. 

Tempérer la rumination et ses effets

Incertitude soudaine, peur du lendemain, souvenirs pénibles, manque de confiance en soi, les situations déstabilisantes sont légion qui déclenchent un malaise immédiat, une gêne, un stress, de l’angoisse, un état d’anxiété qui peut culminer par une crise de panique. Lâcher prise permet justement d’éviter cette surconsommation d’émotions et d’énergie qui affaiblit le mental quand un coup dur survient. 


L’objectif est de tempérer la rumination mentale, les questions qui se précipitent, les souvenirs désagréables qui nous polluent, le doute qui brouille toute décision. Le lâcher prise, ce n’est pas forcément mettre de côté ou renoncer à ce qu’on veut, mais réévaluer la situation non par rapport à des pensées invasives et parasites, mais selon une vision plus juste des choses. 

Outils et indicateurs

Il importe de réussir à se distancer et à s’adapter, interroger ses forces et ses limites, revoir ce sur quoi on a encore le contrôle, ce qui nous échappe. Des outils comme les pensées alternatives, l’exercice du meilleur ami, l’écriture peuvent y aider. Formuler son état, ses ressentis, ses peurs par écrit clairement, sur le papier favorise la mise à distance. Sortir, marcher, lire, regarder une série, tout ce qui peut détourner l’attention, est à privilégier. 

Et puis il faut aussi être capable d’identifier quand lâcher prise. Chacun présente des indicateurs précis de fatigue mentale et émotionnelle, cela peut se traduire par un manque de concentration, une fatigue soudaine, des maux de tête, de l’irritabilité… connaître ces indicateurs en amont, les avoir ciblés, en repérer le fonctionnement est un atout majeur.

À chacun son lâcher prise

Il faut aussi tenir compte du contexte : il est par exemple plus difficile de lâcher prise qu’on est déjà fatigué, contrarié, malade ou convalescent. Dans tous les cas, il faut bien comprendre qu’on ne lâche pas prise comme ça sur un claquement de doigts. Il n’y a pas de magie, il y a de la patience. Les outils, même pratiqués sur le long terme, ne seront pas forcément efficaces immédiatement, il faudra un temps d’adaptation.

C’est que toutes les situations de stress diffèrent, de même l’état dans lequel on est. Quelque chose qui nous indiffère à un moment de notre vie, va devenir obsédant à un autre moment, il faudra alors lâcher prise là où il n’y avait aucune angoisse auparavant. À chacun son lâcher prise donc, en fonction de son état, des circonstances, des situations. Il n’y a pas de remède miracle, il ne doit pas non plus y avoir de honte ni de culpabilité à ne pas réussir à « lâcher prise ».

Comme l’explique très bien Alexandre Jollien dans Le Petit traité de l’abandon, lâcher prise peut devenir une angoisse en soi : il faut alors « lâcher, même le lâcher prise » et accepter de ne pas pouvoir contrôler sa reprise de contrôle. Cet article vous interpelle ? Vous avez du mal à lâcher prise et cela vous handicape dans votre quotidien ? Contactez-moi afin d’en discuter.

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