Outil clé de la thérapie cognitivo-comportementale, l’exercice du meilleur ami est une étape essentielle dans le processus d’affirmation de soi. C’est en conséquence un outil complexe à utiliser, car il s’agit de combattre de vieux réflexes d’autocritique et de dévalorisation. Mais une fois qu’on sait le manipuler, ses avantages sont indéniables.

Être son meilleur ami ? Pas si évident que ça…

Être votre meilleur ami ? La formule a dû vous surprendre, même vous faire rire, en tout cas vous interpeller. Bien sûr que vous êtes votre meilleur ami, cela ne fait aucun doute, vous agissez pour votre bien, pour votre intérêt. En êtes-vous si sûr ?

  • Quand vous vous regardez dans un miroir et que vous vous dites “non mais quelle grosse vache !” 
  • Quand vous craquez et fumez une cigarette alors que vous tentez désespérément d’arrêter, et que vous pensez “pauvre type, t’es nul, t’arrives même pas à surmonter ça.”
  • Quand vous êtes malade et que vous vous sermonnez : “Il faut que j’arrête de me plaindre, il y a des gens qui souffrent tellement plus que moi”.

Eh oui, les exemples abondent qui prouvent combien nous nous dévalorisons au quotidien ; pire, dans l’intimité de nos consciences, nous n’hésitons pas à nous fustiger avec une violence verbale sidérante que l’exercice du meilleur ami met particulièrement en évidence.

L’exercice du meilleur ami : une prise de conscience

En effet, ces autocritiques si virulentes, je les entends en boucle lors des premières séances de thérapie dans la bouche de patients dévorés d’anxiété et de mal-être. Ils sont tellement habitués à se flageller qu’ils ne le remarquent même pas. C’est alors qu’on reprend exactement leurs termes (il importe d’utiliser les mêmes mots), puis on leur demande : “diriez-vous cela à votre meilleur ami ?” La réponse est presque toujours : “Non”, comme une évidence, suivie d’un vague malaise. Surtout quand on ajoute : « Alors pourquoi est-ce que vous vous le dites ? »

Et pour cause : son meilleur ami, on le réconforte, on le soutient, on l’encourage. On ne l’insulte pas, on ne le culpabilise pas, ou alors c’est qu’on a un sérieux problème dans la relation, et que le meilleur ami en question est masochiste. C’est à ce stade que survient la prise de conscience du phénomène, de sa grande brutalité. Le patient saisit soudain à quel point il se moleste psychiquement, en employant pareilles tournures, qui relèvent parfois de la maltraitance verbale.

Un outil… et un cap à dépasser

Cette première étape constitue un cap à dépasser ; pour ce faire, il va falloir identifier plusieurs éléments :

  • comment s’exprime cette autocritique, avec quels termes ;
  • sur quels sujets elle se focalise (poids, interaction sociale, qualité du travail… ) ;
  • à quelle fréquence elle s’exprime, dans quelles circonstances (est-elle régulière, augmente-t-elle en période de stress professionnel ou familial, s’atténue-t-elle dans les moments de calme et de repos ?) ;
  • d’où peut venir cet effet d’autocritique, ce qui l’a enraciné (parents, professeurs, managers… ).

En parallèle, il importe de résorber cette tendance à la dévalorisation constante en développant une stratégie d’atténuation. Nous arrivons au cœur même de l’exercice du meilleur ami. À chaque fois que vous êtes confronté à une situation d’angoisse, un moment de doute, une montée d’anxiété, demandez-vous ce que vous diriez votre meilleur ami. Par exemple, si vous sentez poindre une attaque de panique, votre meilleur ami vous dirait-il : 

“Arrête ton cirque, tu sais que ce n’est rien, il y a tellement plus grave dans la vie, stoppe ça, c’est juste pour te rendre intéressant” ? 

Ou bien : 

“Bon, c’est une attaque de panique, tu en as déjà eu, tu sais ce que c’est, comment ça fonctionne, tu sais très bien la gérer, tu vas y arriver, j’ai confiance en toi. Ne culpabilise pas, ce n’est pas ta faute, les troubles anxieux sont une souffrance, tu n’as pas à en avoir honte, tu vas très bien y arriver, et si tu n’y arrives pas, ce n’est pas grave, tu as déjà beaucoup progressé” ?

Un travail de déconstruction, de revalorisation et de pondération

On le constate, l’outil du meilleur ami permet d’instaurer une distanciation positive, d’exprimer une vision plus pondérée et équilibrée de sa situation, de sortir de la spirale du “je fais tout mal, car je suis intrinsèquement incapable, nul et sans valeur aucune”. Cela prend néanmoins du temps.

  • Au début du parcours thérapeutique, mettre en place ce meilleur ami intérieur est complexe, il faut s’y contraindre, cela demande un effort pour que ce meilleur ami déconstruise du tac au tac chaque critique. Cette déconstruction peut d’ailleurs faire l’objet d’un échange avec son psychologue qui aidera à mettre en place un lexique, des tournures appropriées.
  • Progressivement, invoquer ce meilleur ami intérieur à chaque situation de stress va devenir un automatisme qui rassure et motive. Va s’instaurer une sorte de dialogue avec soi-même, qui permet d’analyser chaque situation et de rééquilibrer la perception de que l’on a de sa personne, de sa réalité, de ses capacités. Il ne s’agit bien sûr pas de passer d’un état de dévalorisation constante à une béatification, nous avons tous des qualités et des défauts. Mais il est bon de les évaluer à leur juste mesure, de les remettre à leur place. Et surtout d’échapper à un sentiment de culpabilité qui n’a rien de constructif. 

La technique du meilleur ami vous intéresse ? Vous vous êtes reconnu dans ces lignes et désirez faire le point ? N’hésitez pas à me contacter pour en discuter.

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