On utilise souvent le terme « dépression » comme un mot-valise, une expression fourre-tout désigant de manière très floue la fatigue, la perte de motivation, les idées noires, la tristesse. Or toutes les dépressions ne se ressemblent pas, comme l’explique très bien le DSM. Parmi les formes les plus sévères figure la dépression mélancolique, parfois méconnue, pourtant bien distincte.

Un effondrement psychique profond

La dépression mélancolique n’est pas une simple variante de la dépression : c’est un effondrement psychique profond, où le sujet perd non seulement l’envie d’agir, mais le sentiment même d’exister. Il se vit comme inutile, indigne, irrécupérable.

Prenons deux exemples concrets :

  • Inès, 35 ans, jeune mère, consulte en pleurs. Elle dit qu’elle est une mère indigne, que son enfant serait mieux sans elle. Aucun traitement ne semble l’atteindre, et elle confesse s’être déjà procuré des médicaments pour « en finir calmement ».
  • Jean, 58 ans, cadre supérieur à la retraite anticipée, ne sort plus de chez lui. Il dit qu’il ne sert à rien, se sent comme mort à l’intérieur, parle de « punition méritée ». Il perd du poids, dort 3h par nuit, et évoque régulièrement des idées suicidaires.

Des symptômes caractéristiques

Ces deux exemples trahissent les symptômes propres à la dépression mélancolique :

  • une tristesse massive, constante, sans variation ;
  • une anhédonie absolue (plus aucun plaisir, même dans les activités habituelles) ;
  • une perte d’appétit, de poids, de sommeil (insomnies matinales précoces) ;
  • un ralentissement moteur ou, à l’inverse, une agitation anxieuse ;
  • un discours marqué par l’auto-accusation, le dégoût de soi, la culpabilité excessive ;
  • des idées suicidaires prégnantes, souvent avec un plan organisé.

La personne peut être envahie par un sentiment d’irréversibilité : « Je suis fichu, je suis une charge, je suis un monstre ».

Une dimension psychique centrale

La dépression mélancolique peut apparaître dans différentes circonstances :

  • dans un contexte de trouble de l’humeur (notamment trouble bipolaire) ;
  • à la suite d’un événement traumatique, d’une perte, d’un deuil.

Des hypothèses biologiques suggèrent des anomalies neurochimiques, notamment au niveau de la régulation de la sérotonine, de la dopamine et du cortisol. Mais la dimension psychique reste centrale : traumatisme profond non pris en charge, deuil pathologique, trouble bipolaire non diagnostiqué …

Une prise en charge sur la durée

La dépression mélancolique nécessite une prise en charge spécifique :

  • Un suivi psychiatrique rapproché, souvent avec hospitalisation à cause du risque suicidaire ;
  • la prise d’antidépresseurs tricycliques ou ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine), parfois complétés par un thymorégulateur ou antipsychotique ;
  • Dans certains cas graves et réfractaires, le recours à l’ECT (sismothérapie) ;
  • Une psychothérapie d’accompagnement, centrée sur le soutien, l’ancrage dans la réalité, la verbalisation progressive de la souffrance.

Ce travail se fait dans la durée, avec prudence. L’objectif est d’accompagner le patient jusqu’à la rémission, puis de travailler sur les fragilités de fond pour prévenir les rechutes.

Une forme de dépression trop souvent invisibilisée

Parce qu’elle isole, parce qu’elle se tait, parce qu’elle s’entoure de honte, la dépression mélancolique passe souvent inaperçue jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Elle est parfois confondue avec une paresse, un caractère, un manque de volonté.

Il est essentiel de la détecter tôt, de nommer cette forme de souffrance, de proposer un cadre sécurisant et un traitement adapté. Ce trouble, grave mais curable, n’est pas une fatalité.

Cet article vous interpelle ? Vous vous retrouvez dans ces lignes ? N’hésitez pas à me contacter pour en discuter.

Pin It on Pinterest

Share This