Imaginez une relation dans laquelle les espoirs sont constamment ravivés par des signes d’intérêt sporadiques, mais jamais concrètement confirmés. Une personne qui vous envoie des messages vagues, qui promet de vous revoir sans jamais fixer de date, ou interagit sur vos publications sans jamais aller plus loin. Loin d’être anodine, cette situation a un nom : le breadcrumbing. Ce comportement manipulateur, souvent alimenté par les dynamiques des réseaux sociaux et des applications de rencontres, peut avoir des conséquences profondes sur la santé mentale de ceux/celles qui en sont victimes. Explications.

Breadcrumbing et Petit Poucet affectif

Anglo-saxon d’origine, le terme « breadcrumbing » peut se traduire littéralement par la tournure “donner des miettes de pain”. L’expression a fait son chemin dans le champ des relations humaines, notamment amoureuses. Popularisé par la culture des rencontres en ligne, elle désigne un comportement manipulateur consistant à distiller de petites attentions sans jamais s’engager pleinement dans une relation.

Tel le Petit Poucet semant des miettes pour ne pas perdre son chemin, le breadcrumber émet des signes d’intérêt sporadiques, juste assez pour garder l’autre dans l’incertitude, sans jamais concrétiser une relation authentique. Amplifié par les réseaux sociaux et les applications de rencontres, ce phénomène ne date pourtant pas d’hier. Il s’agit d’une forme subtile de manipulation émotionnelle, qui peut avoir des conséquences profondes sur la santé mentale des victimes.

Il n’existe à ce jour que peu d’études scientifiques spécifiques sur le sujet. Cependant, certaines recherches sur des comportements similaires, comme le ghosting ou la manipulation émotionnelle, permettent d’éclairer les mécanismes psychologiques à l’œuvre dans le breadcrumbing. Les psychologues s’intéressent de plus en plus à ces dynamiques contemporaines, souvent liées à des traits de personnalité comme la perversion narcissique ou des styles d’attachement insécures. Ces recherches contribuent à mieux comprendre les relations toxiques dans un monde hyperconnecté.

Sous des airs inoffensifs, un comportement manipulateur ?

Le breadcrumbing se distingue par son apparente innocuité. Contrairement au ghosting cité précédemment, où la personne disparaît soudainement sans explication, le breadcrumber maintient un contact minimal, suffisant pour entretenir l’espoir. Ce contact peut prendre la forme de messages vagues (« Hey, comment ça va ? »), de likes sporadiques sur les publications des réseaux sociaux, ou encore d’invitations floues (“On se voit bientôt !”).

Cette forme de manipulation peut survenir dans différents contextes.

  • Relations amoureuses : Le breadcrumber garde son partenaire potentiel dans l’attente, distillant des signes d’intérêt sans jamais concrétiser une relation stable.
  • Relations amicales : Un ami qui disparaît pendant des mois puis revient avec un message amical sans pour autant chercher à réellement renforcer le lien.
  • Milieu professionnel : Des managers ou employeurs qui laissent planer de fausses promesses d’évolution ou de reconnaissance sans jamais passer à l’acte.

Il importe de comprendre que le breadcrumber, notamment le breadcrumber affectif ne cherche pas nécessairement à faire du mal. Son comportement est souvent le reflet de ses propres insécurités et de sa peur de l’engagement. Ses motivations sont diverses.

  • Certains breadcrumbers éprouvent une peur irrationnelle de l’engagement émotionnel. Ils préfèrent maintenir une distance pour éviter toute responsabilité affective.
  • Le breadcrumber cherche généralement une validation extérieure pour combler un manque d’estime de soi. Garder plusieurs personnes “sous le coude” leur permet de se sentir désirés.
  • Dans un monde où les rencontres sont de plus en plus faciles grâce aux applications, certains individus souhaitent garder plusieurs options ouvertes sans s’attacher à une seule personne.

Un impact psychologique non négligeable

Le breadcrumbing n’est cependant pas anodin. Il peut même avoir des conséquences profondes sur la santé mentale des personnes qui en sont victimes.

  • Confusion et insécurité émotionnelle : La victime ne sait jamais à quoi s’en tenir. Elle oscille entre espoir et déception, ce qui peut provoquer un état de stress permanent.
  • Baisse de l’estime de soi : Se sentir constamment mis en attente peut affecter l’estime de soi. La victime en vient à penser qu’elle n’est pas digne d’un engagement sincère.
  • Peur de l’abandon : Le breadcrumbing peut raviver des traumatismes d’attachement préexistants, notamment la peur de l’abandon.
  • Difficulté à poser des limites : La victime peut avoir du mal à reconnaître qu’elle est manipulée et à mettre fin à cette relation toxique.

Il importe donc d’être à même d’identifier les signes avant-coureurs de ce phénomène pour s’en prémunir. Parmi ces signaux d’alarme, on trouve notamment :

  • Des messages sporadiques mais jamais engagés, émis de façon irrégulière, des messages souvent très vagues, qui ne débouche jamais sur une vraie conversation.
  • Des invitations floues, du type “On se voit bientôt !” mais sans jamais fixer de date précise.
  • Des promesses non tenues, qui ne se concrétisent jamais.
  • Un intérêt intermittent, qui oscille entre le chaud et le froid, maintenant un état de confusion chez la victime.

Comment réagir face au breadcrumbing ?

Si vous reconnaissez les signes de breadcrumbing, voici quelques conseils pour ne pas tomber dans le piège :

  • Identifiez le schéma, prenez conscience du comportement manipulateur.
  • Posez des limites claires, exprimez vos attentes clairement et refusez de rester dans l’incertitude.
  • Instaurez une distanciation émotionnelle, prenez du recul pour éviter de vous laisser affecter par les mécanismes de manipulation.
  • Concentrez-vous sur votre propre valeur, rappelez-vous que vous méritez une relation sincère et réciproque.

Et si vous ne parvenez pas à vous soustraire au breadcrumber, n’oubliez pas qu’un psychologue peut jouer un rôle essentiel pour vous aider, notamment à :

  • Restaurer l’estime de soi : Le travail thérapeutique permet de réparer les blessures narcissiques provoquées par la manipulation.
  • Identifier les schémas toxiques : Le psychologue aide à prendre conscience des comportements répétitifs dans les relations.
  • Développer des stratégies pour poser des limites saines : Apprendre à dire non et à reconnaître les signes de manipulation.

Cet article vous interpelle ? Vous vous retrouvez dans ces lignes ? N’hésitez pas à me contacter pour en discuter.

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