L’hypervigilance, on en a déjà parlé sur ce blog, notamment avec l’article « L’hypervigilance : comment y faire face ». Force est de constater que vivre dans cet état en permanence, c’est comme garder le pied sur l’accélérateur 24h/24. Le corps, l’esprit, les sens — tout reste en tension, prêt à réagir. Même lorsque le danger n’existe plus, le système nerveux, lui, continue d’y croire. Pour sortir de ce mode « alerte permanente », “se raisonner” ne suffit guère. Il faut aussi rééduquer le corps, réapprendre à ressentir la sécurité.
Le mode alerte : un réflexe de survie devenu chronique
Lorsqu’une personne a vécu un traumatisme, un stress prolongé ou une peur intense, son système nerveux entre en mode de défense : fuite, combat ou sidération. Ce réflexe, vital à court terme, peut rester activé longtemps après l’événement.
Le cerveau et le corps s’habituent à cette tension. Le moindre bruit, une remarque, une situation imprévisible suffisent à réactiver le signal d’alarme. En thérapie, on observe souvent ce phénomène : la tête “sait” que le danger est passé, mais le corps, lui, ne le croit pas encore.
Le système nerveux autonome : comprendre la mécanique
Et c’est là qu’il convient de rappeler le fonctionnement du système nerveux autonome. Ce dernier régule nos réactions involontaires : rythme cardiaque, respiration, digestion, tension musculaire.
Il se compose de deux branches principales :
- Le système sympathique, qui prépare à l’action (alerte, stress, vigilance).
- Le système parasympathique, qui favorise le repos, la récupération, la détente.
En hypervigilance, l’équilibre se rompt : le sympathique domine, maintenant l’organisme en mode “survie”. Apaiser le système nerveux, c’est donc redonner de la place au parasympathique — celui qui permet de relâcher, digérer, respirer, sentir la sécurité.
Le nerf vague : un allié pour retrouver la sécurité intérieure
Le nerf vague est central dans ce processus. Il relie le cerveau au cœur, aux poumons et aux viscères, et joue un rôle clé dans la régulation émotionnelle.
Quand il fonctionne bien, il envoie au cerveau le message : “Tu peux te détendre, tout va bien.”
Quand il est sous-activé, le corps reste en alerte, même sans menace.
Certaines pratiques vont favoriser cette régulation naturelle :
- La respiration lente et profonde (cohérence cardiaque, respiration 4-7-8, ou simple respiration abdominale).
- Le chant, le rire, le fredonnement : ils stimulent directement le nerf vague.
- Le contact social sûr, les interactions apaisantes, les câlins, la présence d’un animal, renforcent le sentiment de sécurité.
Des outils pour calmer le corps et rééduquer la sécurité
Bref, sortir du mode alerte passe souvent par le corps avant les pensées. Voici quelques approches utiles :
- L’ancrage sensoriel : sentir ses appuis au sol, le contact du corps avec la chaise, écouter les sons du présent. Cela aide à revenir “ici et maintenant”.
- Les exercices somatiques (Somatic Experiencing, TRE, relaxation progressive de Jacobson) permettent d’évacuer la tension accumulée.
- La routine corporelle douce : sommeil régulier, mouvement lent (yoga, étirements, marche), alimentation stable. Le corps aime la prévisibilité.
- La pleine conscience : observer sans juger ce qui se passe dans le corps, reconnaître les sensations sans les combattre.
Ces gestes répétés apprennent peu à peu au système nerveux que le monde n’est plus dangereux.
En thérapie : du contrôle à la confiance
L’enjeu thérapeutique ici n’est pas d’éteindre le système d’alarme, mais de lui apprendre à se calmer plus vite.
Le psychologue aide le patient à :
- Identifier les déclencheurs de l’état d’alerte.
- Créer des “îlots de sécurité” (rituels, environnements, relations stables).
- Réhabiliter le corps comme espace sûr.
Petit à petit, la peur perd sa mainmise, et le corps retrouve sa capacité naturelle à alterner tension et détente.
En résumé ?
Apaiser l’hypervigilance, ce n’est pas “être moins fort”, c’est redonner au corps la possibilité de se sentir en sécurité. Sortir du mode alerte, c’est réapprendre à habiter son corps sans peur — respirer, ressentir, vivre, tout simplement.
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