Dans l’arsenal de la Thérapie Cognitivo-Comportementale (TCC), « La princesse au petit pois » occupe une place clé. C’est en effet l’outil indispensable pour combattre les sentiments néfastes qui nous empêchent d’évoluer : culpabilité, honte, colère… De quoi s’agit-il ? Comment cela fonctionne ? Quels sont les avantages ? Explications.
« La princesse au petit pois » : le conte
Avant d’être un outil clé de la TCC, « La princesse au petit pois » est un apologue, un conte célèbre. Publié pour la première fois en 1835, « La Princesse au petit pois » est écrit par l’auteur danois Hans Christian Andersen. Désireux d’épouser une vraie princesse, un prince parcourt la terre en quête de la parfaite candidate. En vain. Une nuit d’orage, une jeune inconnue se réfugie au château royal. Elle se présente comme une princesse. Mais l’est-elle vraiment ? Méfiante, la reine décide de tester la demoiselle à son insu.
Elle lui fait préparer une chambre, mais prend soin de placer, bien caché sous les vingt matelas et les vingt édredons qui recouvrent le lit, un petit pois. La demoiselle se couche ; quant au matin, la reine lui demande comment elle a dormi, elle lui répond qu’elle a à peine fermé l’œil, sans cesse gênée par une sensation d’inconfort. La reine est alors convaincue d’avoir une vraie princesse face à elle, car seule une véritable princesse, délicate et sensible, est à même de ressentir ce petit pois à travers l’extravagante pile de matelas moelleux.
« La princesse au petit pois » : le complexe
Ce conte délicieux a inspiré Karen Horney, psychanalyste et théoricienne du développement de la personnalité. Dans les années 1930, cette dernière élabore le « complexe de la princesse au petit pois » : ce concept psychologique fait référence à une hypersensibilité ou à une sensibilité excessive chez une personne. Horney l’a utilisé pour décrire une personne qui se considère comme spéciale, délicate et hypersensible aux stimuli environnementaux. Précisons que le complexe de la princesse au petit pois est souvent utilisé de manière informelle et n’a pas une base scientifique solide. Il ne fait pas partie des classifications diagnostiques reconnues, n’est pas reconnu comme un trouble mental officiel dans le DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux).
Néanmoins, il peut être utilisé comme une métaphore pour décrire certaines caractéristiques de la personnalité. Les individus présentant un « complexe de la princesse au petit pois » peuvent être très réactifs aux émotions, aux sensations physiques, aux critiques et aux inconforts mineurs. En termes de comportement, cela peut se manifester par une tendance à se sentir facilement blessé, à rechercher constamment la validation et à avoir des attentes élevées par rapport aux autres. Les personnes ayant ce complexe peuvent être perfectionnistes, exigeantes et avoir du mal à faire face à l’adversité. Elles peuvent également chercher à éviter les situations inconfortables ou stressantes.
« La princesse au petit pois » : l’outil TCC
Ce n’est pas ce qui nous intéresse ici. En effet, « La Princesse au petit pois » intervient également dans le cadre des thérapies cognitivo-comportementales dont elle constitue un outil clé. Il ne s’agit plus de désigner une hypersensibilité, mais d’accompagner les différentes étapes de la thérapie et d’aider les individus à explorer et à remettre en question leurs croyances et leurs pensées irrationnelles. Cette démarche est presque toujours synonyme de culpabilité, de honte, de sentiment d’impuissance. Autant de pensées parasites qui freinent considérablement le processus de distanciation et de réflexion. « La princesse au petit pois » permet justement de prendre conscience du processus, mais aussi de neutraliser ces pensées par une image très forte, très claire, facilement mémorisable et qu’on peut visualiser pour se défendre par exemple en cas d’attaque de panique.
Imaginons un patient atteint de crises d’angoisse, et qui vit en état d’anxiété chronique. Il en souffre d’autant plus qu’il se reproche d’être incapable de surmonter cet état. « Je suis nul.le », « je n’arrive pas à gérer », « pourquoi je m’effondre à la moindre occasion alors que d’autres arrivent à surmonter ? », « pourquoi ça m’arrive à moi ? »… toutes ces pensées s’amoncellent comme les matelas du conte sur le petit pois de cette anxiété quotidienne qu’il faut pourtant scruter pour en comprendre l’origine, les mécanismes, l’impact. Pour régler le problème du petit pois, il faut se débarrasser des matelas. Donc identifier les émotions désagréables, culpabilité, honte, reproche, colère… En visualisant cette montagne d’édredons étouffants, on comprend mieux le poids néfaste de tous ces sentiments, on saisit surtout combien ils rendent notre perception opaque.
L’outil « La Princesse au petit pois » est donc à placer en bonne position dans sa trousse d’urgence TCC car il permet de combattre cette culpabilité d’autant plus malsaine qu’elle parasite tout le reste du processus. Mettre sa culpabilité à distance, c’est déjà une première victoire dans le déroulement d’une thérapie cognitivo-comportementale. C’est aussi un passage important qui permet ultérieurement de favoriser la réflexion et l’ajustement des schémas de pensée déformés, contribuant ainsi au bien-être émotionnel et au développement de stratégies d’adaptation plus saines.
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