Une de mes connaissances m’a récemment posé une question intéressante :  “Pourquoi tu ne fais pas des vidéos plutôt que des articles écrits ? Tu aurais plus de visibilité, de likers.” “Mais ce n’est pas mon but” lui ai-je répondu. Et Je lui ai ensuite expliqué pourquoi écrire et publier un article a beaucoup plus de valeur thérapeutique à mes yeux, surtout dans un monde digital voué à l’image.

Un texte, plusieurs objectifs thérapeutiques

Je n’ai pas placé l’écriture au centre de mon blog et de mes publications social media par hasard. En effet, ce choix répond à une stratégie. Je passe sur les joies du référencement SEO et autres petits bonheurs liés à la visibilité organique ; mes textes ont avant tout des finalités en lien avec la psychologie et la thérapie.

  • Il s’agit principalement d’apporter un éclairage sur les questions de santé mentale, les outils existants… La psychologie est une discipline vivante, innovante même, elle est en perpétuelle évolution, et il importe d’en parler, tout en explicitant ses bases. 
  • C’est aussi un excellent moyen d’informer ceux qui les lisent de ma manière de travailler, d’aborder la thérapie, de rassurer, d’interpeller, de potentiels patients, des proches de patients.
  • Chaque texte est pensé comme un outil thérapeutique : il m’arrive d’ailleurs régulièrement de clore mes consultations en conseillant à mes patients de lire tel ou tel texte, afin d’avoir un éclairage supplémentaire sur un point abordé durant l’échange, de découvrir une méthode pour gérer l’angoisse, l’épuisement, la communication avec autrui…
  • En écrivant des articles et des textes, j’encourage la lecture, donc un temps de pause, de recul, de réflexion, un moment de concentration, ce qui est essentiel dans la thérapie. Je suis ainsi cohérent avec mon approche et mes valeurs, 
  • Écrire un texte, c’est construire une argumentation, l’appuyer de chiffres, d’exemples, la consolider avec des sources, des références, de la documentation. C’est toute une architecture de pensée qui rompt avec la tendance du fast content (quelques informations lâchées sur un carrousel ou un thread, sans aucune profondeur ni nuance) et l’infobésité générée.
  • Écrire m’impose de clarifier régulièrement ma propre réflexion, or c’est absolument élémentaire chez un psychologue que de prendre du recul sur sa pratique, de la questionner et de l’ajuster au fil du temps. 

Des écueils de la vidéo en milieu psychothérapeutique ?

Précisons que certains contenus vidéo dédiés à la psychologie sont d’excellente qualité, et je n’hésite pas à les partager sur mes différents comptes, à en conseiller le visionnage. Néanmoins, parce que tous les jours, en consultation, je mesure les ravages du bombardement de contenus opérés sur les réseaux sociaux, je suis devenu un adepte du slow content qui se méfie énormément de ce règne de l’image. 

  • Aujourd’hui, l’image dicte sa loi sur le social media ; ce type de contenus est plébiscité, trop peut-être, y compris chez les psychologues qui communiquent via internet, d’où un carambolage de contenus qui se répètent dans leur forme et leur sens, sans jamais ouvrir de perspectives. 
  • Écrire plutôt que d’opter pour une vidéo (en plus, je suis un piètre vidéaste, très mauvais scénariste, cadreur et monteur), c’est échapper aux contenus prémâchés, dont les modèles sont déjà définis  (réels, stories, short sur YouTube, usage de musiques en vogue…),qu’il faut voir plusieurs fois pour en déchiffrer les sous-titres, bourrés de fautes d’orthographe, de contre-sens. Et de véritables injonctions au bonheur, à la perfection, sans compter le côté chronophage de leur conception.
  • Écrire des textes plutôt que de participer à ce bombardement visuel, c’est alléger la charge mentale liée au fait de regarder des vidéos en continu (fatigue visuelle, auditive et cognitive, difficulté à mémoriser les infos, effet hypnotique, façonnage de la pensée…) et l’anxiété informationnelle qui peut en résulter.      
  • C’est aussi réintroduire l’effort analytique. L’usage de la vidéo implique de fournir l’information tout de suite, prédigérée et sans nuances. Cela altère la curiosité, le questionnement. Or, je veux que mes patients s’interrogent, c’est le fondement même de la psychothérapie.
  • Et puis, il y a le côté ludique/cour de récré des vidéos produites, cet effet TikTok qui me gêne : cette infantilisation me dérange, car elle est inadéquate avec la souffrance vécue par certains patients en détresse profonde. Beaucoup de vidéos publiées en ligne misent sur le rire, la banalisation, le rêve, le côté “on en rit”, “c’est normal”, beaucoup d’injonctions aussi au fait de ne pas culpabiliser, de s’accepter comme on est. Or c’est tout le problème, et souvent le nœud à résoudre, au cœur de la démarche de patients en souffrance profonde. Et je n’ai pas envie de rire avec ça. 

Ce texte vous parle ? Il vous pose question ? Vous désirez en discuter ? N’hésitez pas à me contacter pour échanger.

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