« Je suis épuisé.e » : cette phrase, je l’entends en continu, d’une consultation à l’autre. Point commun de mes patients atteints d’anxiété, de burn-out, de dépression et autres troubles mentaux : la fatigue. Pas seulement physique : une fatigue profonde, complète, comme si on n’avait plus du tout de tonus. Une pile à plat, une batterie vidée : l’image est évocatrice. On pense alors à recharger son stock d’énergie. Première étape pour y parvenir : identifier le type de fatigue mentale qui a conduit à cet état d’exténuation. Quelques exemples ?
La fatigue liée à la charge mentale
Elle touche celles et ceux qui sont soumis à un rythme de vie intense et que cette cadence infernale a complètement vidé.es. Cela implique par exemple :
- faire jour après jour des trajets maison/travail importants qui supposent de se lever tôt, de revenir tard, de passer beaucoup de temps en voiture ou dans les transports en commun ;
- assumer les contraintes quotidiennes, gérer les enfants, les courses, le ménage, les repas, le budget, l’administratif ;
- devoir s’occuper d’un proche malade ou en difficulté.
La fatigue émotionnelle
La fatigue émotionnelle désigne un état affectif intense, particulièrement désagréable, qui perdure, génère un état de stress chronique et vampirise progressivement toute l’énergie.
- Cet état peut découler des conflits avec l’entourage intime, amical et /ou professionnel.
- Il peut aussi résulter d’une relation toxique, de la proximité avec un pervers narcissique, un manipulateur, qu’il s’agisse d’un conjoint, d’un parent, d’un ami, d’un collègue.
La fatigue cognitive
La fatigue cognitive est clairement liée à une activité cérébrale intensive.
- Une rumination constante d’informations et de pensées désagréables et invasives.
- Un trop-plein d’informations, la fameuse infobésité liée à une surconsommation des réseaux sociaux.
- Trop de décisions à prendre au quotidien, qu’il s’agisse de gérer le train de la maison ou de créer en continu au sein de son activité professionnelle.
La fatigue compassionnelle
Elle suppose un état de stress émotionnel chronique lié à une hypersensibilité qui se traduit par une hyper empathie, soit la capacité de ressentir et de partager en continu les émotions d’autrui. Cela peut constituer une force, mais aussi un handicap quand on est dépassé, usé par ce flot de ressentis.
- On trouve ce type d’épuisement chez les professionnels de la santé, infirmiers, aide-soignants, secouristes, mais aussi chez les travailleurs sociaux, les enseignants, les psychologues.
- De plus en plus, les accros des réseaux sociaux sont également touchés ; les social media fonctionnent sur le stimulus constant de ressentis, créant un grand huit émotionnel où on passe du rire aux larmes très rapidement. Surfer en continu peut donc créer une usure empathique.
La fatigue existentielle
Cet épuisement provient d’une perte de sens, d’un conflit de valeurs, d’un manque de reconnaissance.
- Cela peut survenir dans le cadre d’une activité professionnelle dans laquelle on ne se reconnaît plus, dont on sent qu’elle se transforme. L’arrivée massive de l’IA dans différents secteurs est en train de créer ce type d’anxiété, par exemple chez les traducteurs, métier d’excellence vidé de son sens par l’automatisation.
- C’est aussi le cas quand on se retrouve dans une situation de dissonance cognitive, par exemple quelqu’un qui refuse les lois du marketing, mais qui intervient comme professeur dans une école de commerce, ou un cadre qui doit procéder à des licenciements alors qu’il a des valeurs humanistes.
- Et puis il y a la conviction qu’on vit dans un monde en train de s’effondrer, où les inégalités pullulent, où la violence est quotidienne. Exemple type : la solastalgie liée à l’effondrement climatique.
Distinguer et identifier ces différents types de fatigue, c’est déjà un premier pas vers la mise en place de parades pour y remédier, comme par exemple la théorie des cuillères. Attention, car on peut très bien cumuler les différents types de fatigues. L’important est de décortiquer le cheminement qui a amené à cette situation d’épuisement, pour ultérieurement en reconnaître les prémices et savoir se reposer avant de vider complètement ses batteries.
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