Continuons notre exploration des facteurs accentuant la vulnérabilité aux crises d’angoisse. Et de nouveau une évidence telle qu’on la néglige au quotidien : le manque d’activité physique joue beaucoup dans le développement d’un terrain favorable aux attaques de panique. Comment ? Explications.
Manque d’activité physique : des risques avérés pour le corps… et le psychisme
Et avant d’expliquer quoi que ce soit, quelques chiffres édifiants. Selon un rapport de l’ANSES (Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale) paru en février 2022, 95 % des Français manquent singulièrement d’activité physique au point de mettre leur santé en péril. Aucune pratique du sport, sédentarité accentuée par l’usage des écrans… la pandémie de COVID en cause ? Non, les statistiques qui consolident cette étude datent de 2016/2017. Déjà en 2020, l’ANSES avait tiré la sonnette d’alarme en ce qui concerne la sédentarité des jeunes publics.
Avec l’étude publiée en 2022, c’est toute la population qui est touchée, notamment les femmes : « 70 % d’entre elles sont en deçà de tous les niveaux d’activité identifiés pour être en bonne santé, contre 42 % des hommes ». Les risques ? Dans le désordre, surcharge pondérale, obésité, altération de la densité osseuse, problèmes cardiovasculaires et respiratoires, hypertension, détériorations musculaires et articulaires, exposition aggravée à des maladies type cancer, risque de diabète, diminution de l’endurance musculaire. Et un impact négatif sur la santé mentale, ce que la période de pandémie a particulièrement mis en évidence.
Manque d’activité physique : des causes multiples
Ainsi, selon l’article « Confinement : les effets de l’absence d’activité physique sur la santé mentale » paru dans le journal Le Point le 5 février 2021 et qui s’appuie sur le Bulletin épidémiologique hebdomadaire n°3, le confinement a eu certes des effets désastreux chez les hommes, qui ont ainsi chuté au même niveau que les femmes ; mais « l’étude montre surtout que le manque d’activité physique et la forte sédentarité ont un impact négatif sur la santé mentale. Chez les personnes déclarant un état dépressif, la prévalence de la non-atteinte des recommandations d’activité physique était par exemple bien supérieure à celle du reste de la population (de 61,1 % pour les hommes à 67,5 % pour les femmes, contre moins de 50 % chez les autres) ». Hommes et femmes, tous âges confondus, atteints de la même manière ou presque. Pourquoi ?
Une vie professionnelle souvent sédentaire dans un univers économique où priment les services, le manque de temps de loisirs nécessaire pour pratiquer une activité, le manque de moyens (pas de budget, pas de cours et d’installations spécialisées à proximité), les freins psychologiques (trop gros, trop moche, peur du regard des autres, obsession du résultat), le manque de motivation aussi. Marie, notre petite héroïne, en sait quelque chose : surchargée de travail, elle rentre lessivée chez elle, doit s’occuper de la gestion du quotidien (enfants, repas, ménage), dispose d’un trop petit budget pour prendre des cours de yoga, elle pourrait le faire en suivant des vidéos gratuites, mais quand elle a terminé sa journée, elle n’en a plus ni l’envie, ni le courage ni l’énergie et préfère s’effondrer devant une série.
Comment la sédentarité affecte la santé mentale ?
Que le manque d’activité physique impacte la santé physique, c’est évident. Mais en quoi cela affecte-t-il le bien-être mental ? Comment la sédentarité affecte-t-elle le psychisme ? Il faut distinguer plusieurs causes.
Accumulation de tension physique
Lorsque nous sommes sédentaires et que nous manquons d’activité physique, notre corps accumule de la tension musculaire et du stress. L’inactivité prolongée peut provoquer une raideur musculaire, en particulier au niveau du cou, des épaules et du dos. Cette tension physique peut être ressentie comme une sensation d’oppression ou de constriction, augmentant ainsi les symptômes physiques associés à la crise d’angoisse. Quand Marie passe de longues heures assise devant son écran d’ordinateur sans s’autoriser une pause ni faire d’exercice, elle accumule une tension physique qu’elle n’évacue pas, ce qui peut à terme déclencher une crise d’angoisse.
Diminution de la régulation du stress
J’en parlais dans l’article dédié aux bienfaits de la marche à pied : l’activité physique joue un rôle crucial dans la régulation de l’anxiété. Elle permet au corps de libérer des endorphines, ces neurotransmetteurs qui procurent une sensation de bien-être et réduisent le stress. Le manque d’exercice peut entraîner une diminution de la production d’endorphines, ce qui peut rendre plus difficile la gestion de la tension. Là aussi, Marie a pu le constater. Habituée à aller nager très régulièrement à la piscine, elle a dû arrêter brusquement de pratiquer ces exercices pendant une période prolongée : trop de travail, une baisse du budget, un manque d’intérêt… sa capacité à faire face au stress a alors baissé et ses crises d’angoisse se sont multipliées.
Perturbation du sommeil
J’ai aussi évoqué cette question au début de cette série d’articles : l’activité physique régulière contribue à réguler notre rythme circadien et à promouvoir un sommeil de qualité. Lorsque nous sommes sédentaires, notre sommeil peut être perturbé, ce qui peut aggraver les symptômes d’anxiété. Un sommeil de mauvaise qualité, une insomnie chronique peuvent entraîner une augmentation de la sensibilité au stress, de l’irritabilité, augmentant ainsi le risque de crises d’angoisse. Marie, depuis qu’elle a stoppé ses activités sportives, a beaucoup plus de difficultés à s’endormir et à faire une nuit complète. Cela impacte son niveau d’anxiété, avec à la clé des crises d’angoisse.
Diminution de l’estime de soi
On n’y pense pas forcément, mais l’activité physique régulière contribue fortement à améliorer l’estime de soi. À l’inverse, la sédentarité entraîne une diminution de la confiance qu’on porte en ses capacités. Sentiment de paresse, manque de motivation, conviction qu’on est incapable, qu’on manque de volonté, culpabilité bien sûr… autant de sentiments négatifs qui augmentent l’anxiété sociale, la peur du jugement des autres… ce qui peut déclencher des crises d’angoisse. Déjà complexée par son corps, Marie depuis qu’elle ne pratique plus d’activité, a le sentiment de grossir, de s’avachir ; les remarques de ses collègues (« Tiens, je ne t’ai pas vu au sport… fais gaffe, tu vas prendre du poids », « cela fait longtemps que tu n’es pas venue nager, ça se voit… » et autres piques désagréables) accentuent le malaise, la honte, la pression, le sentiment de ne plus contrôler ni son corps ni sa volonté, ce qui accroît considérablement l’anxiété et peut déboucher sur des crises de panique.
Maintenir un mode de vie actif, incorporer régulièrement de l’exercice physique dans son quotidien est essentiel pour conserver une bonne santé physique et mentale. C’est aussi un excellent moyen de juguler le stress, de canaliser les émotions et d’éviter les crises d’angoisse. Cela ne doit cependant pas devenir une obsession, encore moins une culpabilité qui va engendrer une pression supplémentaire. Il faut trouver un équilibre, une activité à pratiquer par plaisir qui convienne à votre rythme de vie et à votre budget, s’intègre dans votre planning et vous permet de lâcher prise.
Cet article vous interpelle ? Contactez-moi pour en discuter.