Enfin vous allez mieux ! Après des mois de thérapie, le spectre des attaques de panique s’éloigne, le mal-être, les angoisses s’estompent, vous retrouvez votre énergie. Vous recommencez à vivre, à travailler, à sortir, à manger au restaurant, à faire du sport, des rencontres. Quel bonheur, quel soulagement ! Et puis au moment où vous vous y attendez le moins, vous rechutez. Anxiété, crise d’angoisse, épuisement… Votre thérapie a-t-elle raté ? Vous n’avez pas su passer le cap ? Non. Vous êtes tout simplement entré.e dans la phase d’ajustement.

TCC en deux temps

Selon mon expérience, les Thérapies Cognitivo-Comportementales se déploient en deux temps.

Durant une première phase, le patient va comprendre ce qu’est l’anxiété, comment elle se manifeste, quels sont ses effets. Il va découvrir les outils à disposition pour atténuer cette anxiété. Il va explorer le fonctionnement de ses angoisses, comment elles se déclenchent, comment elles se manifestent, quels sont leurs effets. Il va découvrir le lien tissé entre ses pensées, ses émotions et ses comportements. On est donc sur un temps de psycho-éducation. Une psycho-éducation qui va progressivement porter ses fruits, tandis que le patient expérimente, met en place ses propres parades.

Vient un second temps : celui de l’ajustement. Il est délicat mais nécessaire. C’est le moment où le patient va définir un nouvel équilibre de vie. Il faut le voir comme une période de rodage, un peu comme une automobile neuve dont on teste le moteur. On a tendance au début à reprendre ses activités en masse, d’un coup, sur un rythme effréné, comme on le faisait avant son burn-out ou sa dépression. C’est justement là qu’il va falloir être observateur et réactif :

  • repérer les signes d’épuisement (oublis, paupière qui clignote, irritabilité)
  • ralentir le rythme
  • s’organiser différemment.

Il s’agit en fait d’être capable d’anticiper, de repositionner les curseurs de la fatigue physique, intellectuelle et émotionnelle de façon à ne plus se retrouver totalement vidé.e de son énergie par surprise.

Définir un nouveau mode de fonctionnement

C’est une expérimentation passionnante mais douloureuse car il s’agit de faire le deuil d’un rythme de vie caduque. Et cela n’est pas facile : les rechutes sont inéluctables, le temps de définir un nouveau mode de fonctionnement. Or, chacune de ces rechutes est vécue comme un échec accompagné de son lot de déception, de frustration, d’incompréhension. Le patient en phase d’ajustement, qui vient de refaire une crise d’angoisse, a l’impression de retomber en enfer, d’avoir annulé des mois, voire des années de thérapie : « Mais pourquoi ? J’étais bien ? Pourquoi ? Qu’est-ce que j’ai mal fait ? » La culpabilité s’ajoute à la liste, bien sûr, alourdissant ce poids.

Et c’est là qu’il faut changer sa manière de percevoir les choses. Il est tout à fait normal, humain même, de vouloir retrouver ce mode de vie antérieur. Au fur et à mesure qu’on récupère de l’énergie, on veut se remettre à faire tout ce qu’on faisait avant. De la suractivité qui se remet en place sans même qu’on s’en rende compte ; quelques excès alimentaires, une ou deux soirées arrosées, du manque de sommeil : le sentiment de se sentir bien, d’être un peu dans un état de grâce érode la perception d’émotions négatives qui sont pourtant encore et toujours là.

Les TCC ne sont pas une baguette magique

C’est que les TCC, et il est essentiel de le rappeler, n’ont pas pour but de les effacer, ces émotions négatives, mais d’apprendre à baisser leur intensité. Les émotions ne fonctionnent pas comme une lampe en mode on/off ; quant aux TCC, elles n’ont pas le pouvoir d’une baguette magique. Immanquablement, les émotions négatives reviendront, c’est normal. Quand elles se présentent en phase d’ajustement, on y réagit, presque de manière allergique. Idem pour le stress, les moments de pression, l’inquiétude, qu’on ne tolère plus, mais avec lesquels il faut pourtant vivre. C’est à cela que sert la TCC.

  • Pour mieux aborder cette phase d’adaptation, il faut aussi envisager sa progression autrement : ne plus se dire « j’ai refait une crise d’angoisse, tout est à refaire, je m’en veux tellement», mais plutôt « j’ai réussi à gérer ma crise d’angoisse, j’en ai perçu les premiers signes, j’ai fait ce qu’il fallait pour en réduire la portée ».
  • La phase d’ajustement est par ailleurs un temps d’acceptation : c’est le moment d’admettre que vous ne reviendrez JAMAIS au rythme que vous aviez avant, non pas parce que vous êtes malade, faible, ou handicapé mais parce que le rythme que vous aviez avant était malsain et complètement aberrant.

On présente souvent les TCC comme des thérapies brèves, ce qu’elles sont initialement. Il ne faut pourtant pas oublier cette phase d’ajustement qui est incontournable. Chaque patient l’abordera à son rythme, selon sa perception, ses objectifs, avec plus ou moins d’obstacles à franchir. Il devra alors garder en tête ce précepte des plus juste : « on apprend en se trompant ».

Cet article vous interpelle ? N’hésitez pas à me contacter pour en discuter.

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