C’est un sujet délicat mais qu’un psychologue est parfois amené à gérer. L’hospitalisation sous contrainte ou hospitalisation sans consentement, permet de soigner une personne atteinte de troubles mentaux sévères sans son consentement, lorsque sa situation représente un danger pour elle-même ou pour autrui. Et c’est un protocole très encadré qui suit plusieurs étapes clés.
Quand a-t-on recours à l’hospitalisation sous contrainte ?
Cette mesure intervient dans des situations spécifiques où il y a danger avéré.
- Lorsque une personne atteinte de troubles mentaux présente un risque élevé de se faire du mal. Cela inclut des comportements suicidaires graves et immédiats, des automutilations, ou des situations où la personne ne peut plus assurer sa propre sécurité en raison de ses troubles.
- Lorsque les troubles mentaux de la personne la rendent potentiellement dangereuse pour les autres, soit des comportements violents, des menaces envers d’autres personnes, ou des actes mettant en danger la sécurité d’autrui
- Dans les cas où les comportements de la personne, en raison de ses troubles mentaux, perturbent gravement l’ordre public.
Concrètement, l’hospitalisation sous contrainte peut s’appliquer à une personne atteinte de schizophrénie avec des délires persécutoires et menaçant la vie d’autrui, un malade atteint de troubles bipolaires sévères en phase maniaque, avec des comportements mettant en danger sa propre sécurité ou celle des autres, un individu en pleine crise psychotique avec des hallucinations auditives ou visuelles incitant à des comportements dangereux.
Les différentes étapes d’une hospitalisation sous contrainte
Il s’agit d’une procédure bien définie, encadrée par la loi pour garantir la protection des droits du patient tout en assurant les soins nécessaires. Elle suit plusieurs étapes.
1. Initiation de la procédure
Il existe deux modes d’hospitalisation sous contrainte.
L’hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT) est émise par un proche, un membre de la famille, ou une personne ayant des relations sociales stables avec le patient. Deux certificats médicaux sont alors requis :
- Le premier peut être rédigé par n’importe quel médecin généraliste, par exemple le médecin de famille.
- Le second doit être établi par un psychiatre qui confirme la nécessité de soins immédiats et l’impossibilité pour le patient de consentir à son hospitalisation.
L’hospitalisation d’office (HO) est décrétée par décision préfectorale (le préfet ou le représentant de l’État prend la décision d’hospitalisation). Il faudra alors émettre un certificat médical signifiant que les troubles mentaux du patient compromettent gravement l’ordre public ou la sûreté des personnes.
2. Admission à l’hôpital
Le patient est admis dans un établissement de santé habilité à recevoir des personnes en hospitalisation sous contrainte. Durant son admission, un médecin, souvent un psychiatre, procède à une évaluation initiale de l’état mental du patient et confirme la nécessité de l’hospitalisation.
3. Période initiale d’observation et de soins
Le patient reçoit les soins immédiats nécessaires pour stabiliser son état. Il est placé en surveillance médicale ; des évaluations régulières sont effectuées pour surveiller l’évolution de son état.
4. Contrôle judiciaire
- L’établissement de santé doit informer le juge des libertés et de la détention (JLD) de l’hospitalisation sous contrainte dans les 24 heures suivant la prise en charge.
- Dans un délai de 12 jours après l’admission, le JLD organise une audience judiciaire pour vérifier la légalité et la nécessité de la mesure. Le patient, ses proches, ou un avocat peuvent être présents et exposer leurs arguments.
- Le JLD peut alors décider de maintenir ou de lever la mesure d’hospitalisation sous contrainte.
5. Réévaluations périodiques
Des examens médicaux réguliers sont effectués pour réévaluer la nécessité de l’hospitalisation sous contrainte. Des certificats médicaux sont rédigés à intervalles réguliers pour documenter l’évolution de l’état mental du patient et justifier la continuation ou la levée de la mesure.
6. Recours et protection des droits du patient
- Le patient ou ses proches bénéficient d’un droit de recours ; ils peuvent contester l’hospitalisation sous contrainte à tout moment devant le JLD.
- Le patient a le droit d’être assisté par un avocat, qui peut être désigné d’office si nécessaire.
- Il doit être informé de ses droits, y compris le droit de contester l’hospitalisation et le droit d’accéder à son dossier médical.
7. Fin de l’hospitalisation sous contrainte
Elle peut être levée si l’état du patient s’améliore suffisamment pour qu’il ne représente plus un danger pour lui-même ou pour autrui, ou si les critères légaux ne sont plus remplis. Une fois la mesure levée, le patient peut sortir de l’hôpital, éventuellement avec un suivi ambulatoire ou des soins adaptés en dehors du cadre hospitalier.
Ces étapes sont conçues pour équilibrer la nécessité de soins psychiatriques pour les personnes atteintes de troubles mentaux graves avec le respect de leurs droits fondamentaux. L’objectif principal de l’hospitalisation sous contrainte est de protéger la personne et la société tout en offrant les soins nécessaires pour stabiliser l’état mental du patient.
Le rôle crucial du psychiatre
Le psychiatre intervient de plusieurs manières dans ce parcours.
1. Evaluation et diagnostic
Il est chargé d’évaluer l’état mental initial du patient. Il doit déterminer si ses troubles mentaux sont suffisamment graves pour justifier une hospitalisation sous contrainte. Il rédige un certificat médical circonstancié détaillant l’état mental du patient et la nécessité de l’hospitalisation.
2. Soins et suivi du patient :
Une fois le patient hospitalisé, le psychiatre est responsable de la mise en place et du suivi du traitement. Il procède à des évaluations régulières pour déterminer l’évolution de l’état mental du patient et l’adéquation des soins.
3. Réévaluations périodiques :
Le psychiatre doit réaliser des examens réguliers pour évaluer si l’hospitalisation sous contrainte est toujours nécessaire. Ces examens permettent de décider de la continuation ou de la levée de la mesure. La fréquence de ces réévaluations est fixée par la loi et peut varier selon la durée de l’hospitalisation.
4. Rédaction des rapports médicaux pour le juge :
Le psychiatre doit fournir des rapports médicaux détaillés au juge des libertés et de la détention, qui contrôle la légalité de l’hospitalisation sous contrainte. Ces rapports sont essentiels pour informer le juge de l’état du patient et justifier la poursuite ou la levée de la mesure.
5. Participation aux audiences judiciaires :
Le psychiatre peut être appelé à témoigner lors des audiences devant le juge des libertés et de la détention. Il présente ses observations et répond aux questions concernant l’état mental du patient et la nécessité de l’hospitalisation sous contrainte.
6. Protection des droits du patient :
Le psychiatre doit veiller à ce que les droits du patient soient respectés tout au long de l’hospitalisation. Cela inclut l’information du patient sur ses droits, la possibilité de contester l’hospitalisation et l’accès à un avocat.
En résumé, le rôle du psychiatre dans une hospitalisation sous contrainte est de garantir que la mesure est médicalement justifiée, de superviser les soins et de s’assurer que les droits du patient sont respectés tout au long du processus.
Le psychologue dans le processus d’hospitalisation sous contrainte
Le psychologue joue également un rôle important dans ce processus.
1. Évaluation initiale et accueil
- À l’admission du patient, le psychologue peut participer à l’entretien initial pour évaluer l’état psychologique du patient et contribuer à une première compréhension de ses troubles.
- Bien que le diagnostic médical soit principalement du ressort du psychiatre, le psychologue peut apporter une évaluation complémentaire des aspects psychologiques, émotionnels et comportementaux du patient.
2. Soins et suivi du patient
- À l’admission du patient, le psychologue peut participer à l’entretien initial pour évaluer l’état psychologique du patient et contribuer à une première compréhension de ses troubles.
- Bien que le diagnostic médical soit principalement du ressort du psychiatre, le psychologue peut apporter une évaluation complémentaire des aspects psychologiques, émotionnels et comportementaux du patient.
3. Bilan psychologique
- Le psychologue peut réaliser des tests psychologiques et des entretiens cliniques pour mieux comprendre les troubles du patient, ses capacités cognitives, ses émotions, et son fonctionnement psychique global.
- Les résultats de ces évaluations sont consignés dans des rapports qui sont partagés avec l’équipe médicale pour une prise en charge globale et multidisciplinaire.
4. Prise en charge thérapeutique
- Le psychologue peut proposer des séances de thérapie individuelle pour aider le patient à comprendre et à gérer ses troubles mentaux. Cela peut inclure des thérapies cognitivo-comportementales, des thérapies de soutien, ou d’autres approches adaptées.
- Des séances de thérapie de groupe peuvent également être organisées pour permettre aux patients de partager leurs expériences, de se soutenir mutuellement, et de travailler sur des compétences sociales et émotionnelles.
5. Soutien et accompagnement
- Tout au long de l’hospitalisation, le psychologue apporte un soutien psychologique continu au patient. Cela inclut l’écoute, l’aide à la gestion du stress, et l’accompagnement dans les moments difficiles.
- Le psychologue peut également jouer un rôle de médiateur entre le patient et l’équipe soignante, facilitant la communication et aidant à résoudre les conflits éventuels.
6. Préparation à la sortie
- Lorsque l’état du patient s’améliore, le psychologue peut participer à la planification de la sortie, en collaboration avec les autres professionnels de santé. Cela inclut la préparation psychologique du patient à son retour à la vie quotidienne et la mise en place de stratégies pour prévenir les rechutes.
- Le psychologue peut organiser un suivi ambulatoire pour assurer la continuité des soins après la sortie de l’hôpital. Cela peut supposer des séances de suivi régulières et des contacts avec d’autres professionnels de santé impliqués dans la prise en charge du patient.
7. Collaboration interdisciplinaire
- Le psychologue participe aux réunions multidisciplinaires où l’état et la progression des patients sont discutés. Ces réunions permettent une coordination optimale des soins et une prise en charge holistique du patient.
- Bien que les décisions finales concernant les traitements médicamenteux et les mesures légales soient du ressort du psychiatre, le psychologue apporte des insights précieux qui peuvent influencer les décisions cliniques et les stratégies thérapeutiques globales.